Ile de Batz, une
cinquième fois.
Ile de Batz, en Bretagne
, est la sortie emblématique
de la Section plongée de l'Association sportive de Saclay, et depuis deux
ans organisée conjointement avec nos collègues de BIII.
Ça fait cinq ans que je suis au club et s'est
ma cinquième sortie à Batz.
C'est une sortie sportive. Sur place il n'y a
pas d'infrastructure de plongée, à part les échelles qu'on installe pour
cette occasion sur « Fée des légendes », le bateau pour passagers
de Roger, qui le met à notre disposition ces quatre jours. Tous le matériel
est transporté depuis notre local de Saclay: les cinq compresseurs d'une
centaine de kilos chacun, une quarantaine de blocs (bouteilles de plongée), le
zodiac avec son hors-bord et tout le nécessaire pour l'apéro de la pause-pipi
sur l'aire de repos de l'autoroute.
Alors, tout ce matériel, plus deux
sacs et une ceinture de plomb par plongeur, est chargé dans la remorque du bus.
Arrivé
à Roscoff tout est transféré sur le bateau, ensuite arrivé sur l'île du
bateau sur la remorque du tracteur et enfin, au "Jardin colonial",
déchargé dans le hangar. Au retour on répète les mêmes opérations dans le
sens inverse, avec la seule différence que la moitié des sacs, ceux qui
contiennent les combinaisons mouillées, sont plus lourds. Nous gonflons les blocs
au "Jardin colonial" et les transportons au bateau, avec le tracteur, pour chaque
plongée.
L'île est très belle. Interdite aux voitures des
visiteurs, elle a préservé son charme de Bretagne profonde, avec ces maisons en
pierre, qu'on aère souvent, j'imagine. Sinon gare au radon, le gaz
radioactif libéré du granite. Même s'il n'y a que très peu d'hôtels
et chambres d'hôtes, l'île est touristique: visitée par des touristes qui
viennent pour la journée. Et pas de magasins pour touristes. Vous
n'êtes pas agressés ni par des marchands de cartes postales ni d'articles
de plage ni de produits régionaux ni de souvenirs d'un goût douteux. On a le
sentiment d'être à la fois au bout du monde et chez soi.
Le
"Jardin colonial"
,
un centre de vacances pour jeunes, est à une vingtaine de minutes de marche du
port. Un trajet qu'on fait quatre fois par jour. On est deux par chambre. Et
malheur à celui qui, à tort ou à raison, à la réputation d'être ronfleur. Au
moment de former les binômes il n'y a pas d'amitié qui tient. Les
meilleurs copains regardent ailleurs. Alors on se retrouve avec plus ronfleur
que soi, forcément.
Ile
de Batz est aussi une sortie gastronomique.
L'équipe de la cuisine du
"Jardin colonial" nous prépare des délices de la cuisine bretonne,
dont beaucoup de fruits de mer. La spatialité locale sont les pétoncles, à volonté. Et au dessert, bien sûr, du Kouign Amann, ce gâteau breton qu'on fait en ajoutant un peu de farine et du
sucre dans du beurre. Et je ne plaisante qu'à moitié, voilà la recette: 500g de pâte à pain,
200g de sucre, 300g de beurre demi-sel et un jaune d’œuf. Heureusement il y a
aussi le far, le flanc breton.
C'est une sortie sportive, surtout les plongées. La
mer est presque toujours agitée et le bateau, sur le site de plongée, gîte
beaucoup. On reste longtemps sur le site, parce qu'on assure nous-même la
surveillance surface. Ceci signifie que la dernière palanquée part après que
la première est remontée sur le bateau. En attendant qu'elle revienne les
plus sensibles au mal de mer se manifestent. Je vois toujours Bruno qui pendant
une heure, à la limite de vomissement, regarde l'horizon. « Alors
Bruno, t'as digéré le pâté du midi ? », c'est Adrian qui trouve le mot juste qui déclenche le déluge. Il y a beaucoup qui souffrent, et
d'autres qui sont cool. Je croise Jean-Louis dans la cabine qui dit:
« Je pose mon phare et j'y vais dégueuler ». Et il fait
exactement ce qu'il dit, dans le même ordre.
Les plongées ne sont pas
faciles, c'est pas la Mer Rouge. La mer est agitée, fraîche (15-16°C), il y
a du courant, mauvaise visibilité. Il y a de beaux paysages, sans plus. On
plonge relativement profond: sur mes six plongées, dont une raté, j'ai fait trois de plus de
30 mètres, avec un de 39. Cette fois si j'ai vu peu de choses intéressantes,
dont deux fois des homards, très beaux éclairés par mon nouveau phare, comme des
bijoux. Il y avait aussi de coquillages Saint-Jacques, on se serait régaler de
les déguster au fond, mais c'est interdit! Certaines avaient plus de chance,
beaucoup de chance: deux poissons-lune au palier. Même nous les autres, sur le
bateau, nous étions impressionnés de voir le parachute et les ailerons, comme
ceux des requins, bouger lentement autour d'eux.
Originaire des Balkans, les marées
de Bretagne me fascinent. Je suis toujours émerveillé de voir les bateaux au
port à sec. En plongée la marée ne facilite pas les choses: qui dit marée,
dit courant. On essaye toujours de plonger à l'étale. On n'arrive pas
toujours de se synchroniser. A la dernière plongée notre palanquée a sorti loin du
bateau, et on n'était pas les seuls. Le zodiac vient nous chercher, il faut
faire vite, il y a plusieurs rotations à faire. On se déséquipe dans l'eau,
on envois la ceinture et le stab avec le bloc sur le zod et on monte. Quand on
est 5 ou 6 on nous amène au bateau.
Ça bouge et on ne peut pas monter
directement. Alors on s'équipe de nouveau, sans les plombs quand même, et on
y va à la nage. Il y a beaucoup de courant, il faut que le zodiac se place en
amont et il faut sauter au bon moment pour que le courant vous amène à l'échelle.
Ce n'était pas si difficile, tout le monde l'a eu.
Au
retour j'appelle Vera d'une cabine à Roscoff. Dès qu'elle décroche,
elle me dit: « Je regarde la télé, il y a un avion qui est rentré dans
une tour à New York. Aiiiiiiiiiiii, voilà un deuxième … !» Oui, on
est le 11 septembre. Des terroristes ont réussi un gros coup. Des milliers des
gens sont morts, les probables représailles vont faire encore beaucoup
d'autres. D'autres encore vont gagner
beaucoup de pognon en exploitant ce malheur. C'est cynique de le dire, mais ça
fait déjà un moment que je ne rêve plus d'un monde meilleur.
Et pour la fin quelques photos sous-marines, sous la surface de la Méditerranée, à l'hommage de mon malchanceux appareil photo que j'ai noyé dès la première plongée. Je n'ai pas eu beaucoup de chance avec ce bidule: je l'avais oublié à la maison en partant pour la Mer Rouge et j'ai raté les photos des mantas à Hawaii et des otaries à Baja.