Les marteaux du Soudan.
Je
suis parti au Soudan voir les requins marteaux. Je le dis tout de
suite: je suis un peu déçu. J'espérai les voir
dans le bleu, même si pas comme sur la photo à gauche.
Je les ai aperçu dans du gris, ma photo à droite.
Depuis un certain temps j'étais assez frustré que le
requin marteau manquait dans mon palmarès des bêtes
marines rencontrées.
Je
les ai vu uniquement dans l'aquarium
de Monterey, en Californie. Je les ai déjà loupé
aux Maldives, à Cabilao (Philippines) et à La Paz
(Mexique). Il me fallait une destination sûre. La meilleure, ce
sont les iles Coco dans le Pacifique, trop chère. J'ai opté
pour Layang Layang, en Malaisie. J'ai contacté Nature Plongée
.
Ziad, que j'ai eu au téléphone, me l'avait déconseillé.
Pas assez probabilité de les rencontrer.
Il
m'avait proposé la croisière au Soudan, là-bas
c'est sûr! Tout en supposant qu'il avait peut-être
intérêt de vendre plutôt cette destination, j'ai
accepté. Cette région est connue pour l'abondance de
ces bestioles. Au moment de réserver je savais que mon amie
Christelle, de la section plongée de Saclay, devait y partir
la semaine suivante. De son retour je l'ai eu brièvement au
téléphone. Elle était ravie: il y avait
de quoi!
Donc
je suis parti en croisière d'une semaine, en voyage organisé.
Neuf plongeurs au départ de Paris. Parmi nous Pascal,
photographe sous-marin professionnel
.
Il m'épate. Il a plongé dans toutes les mers du monde,
y compris dans l'Arctique et dans l'Antarctique.
Au
cours de la croisière il m'avait donné plein de
conseils concernant la photo. Il m'avait aussi rassuré sur
l'âge limite pour la pratique de la plongée. Vol
Emirates sur un A380 pour
Dubaï, en contournant
les zones de guerre. Même la classe économique est
confortable. Sept heures de correspondance à Dubaï. Un
petit malheur: j'ai allumé le téléphone
portable, en oubliant de désactiver l'itinérance.
Au
bout de moins d'une heure j'étais prévenu que j'avais
50 euros au compteur. Uniquement en utilisant le WiFi et le GPS !
Christelle m'avait prévenue que la correspondance à
Dubaï est de sept heures et qu'il est possible de visiter la
ville. Mes coéquipiers n'étaient pas intéressés,
ils préféraient ce prélasser dans le salon
Merhaba : "Il y a rien à
voir, que des gratte-ciels." J'ai renoncé. J'ai vu Dubaï
que par l'hublot. Ensuite vol
sur le low coste
Fly Dubaï, pour Port Soudan. Le moniteur sur mon siège
m'indique que je suis dans une région du monde ou la langue
française n'est pas dominante.
Port
Soudan est le seul grand port du pays, le petit aéroport
dans le désert ne le présage pas. Ici on a rencontré
le reste des équipiers: cinq espagnols et quatre italiens.
Quand le tapis roulant s'est arrêté, notre ami Pascal
est resté les bras vides. Son sac de plongée, on a
appris plus tard, est resté à Dubaï. Il l'avait
récupéré au retour.
On
nous a informé que notre bateau, qui venait d'arrivé
d'Hurgada en Égypte,
avait du retard avec les formalités et qu'on passerait la
première nuit à l'hôtel.
L'avantage
inattendu était qu'à l'hôtel Coral,
ancien Hilton, on avait le Wi-Fi. J'ai partagé la chambre (et
par la suite la cabine) avec Diego,
un espagnol sympa de Cordoue. Apres diner, avec les espagnols je suis
sorti voir le bateau et faire
un tour
.
Comme dans toutes les villes au bord de la mer, il y a une promenade
sur la rive. Dans un pays des plus pauvres du monde. Pas de
restaurants ou cafés. Des gargotes. Des vendeurs ambulants,
dont le jeun homme qui vend des amuse-gueules,
y compris des sauterelles.
Des gens qui jouent au billard
ou aux cartes. Jolies femmes,
voilées ou pas.
Le couple d'espagnols qui était déjà venu a
rencontré notre capitaine, qu'ils connaissaient. On est allé
boire un thé ensemble.
Notre
bateau, Cyclone, est un yacht de 32 mètres, avec quatre ponts
à notre disposition. Au niveau de la mer l'espace
plongée et la salle à manger où des excellents
repas, a mon gout, nous était
servi. Au dessus le salon et l'espace
détente. En haut l'espace bronzage avec le jacuzzi.
Comme à ma croisière aux Maldives, le jacuzzi est resté
vide. Tout simplement personne n'avait demandé de le remplir,
avec trois ou quatre plongées par jour on est suffisamment
dans l'eau. Pendant cette croisière personne n'est allé
à l'eau pour se baigner, non plus. Dans la "cale",
nos cabines. Les cabines sont
à deux couchettes, avec salle de bain. Très agréable
de pouvoir prendre une douche chaude après chaque plongée.
J'avais pris la couchette supérieure.
On
faisait entre deux et quatre plongées par jour: 2-4-3-3-4-3.
Un total de 19. A la fin de la croisière je n'étais pas
peu fière de constater que j'étais le seul à les
avait toute fait. Toutes les plongées sur trois cites: Silayet
pour Umbria et les lagons de Sha'ab Rumi et Sanganeb pour traquer les
marteaux. A Sha'ab Rumi on a plongé aussi sur le cite de
Précontinent II de Cousteau. A Sanganeb on avait visité
le phare. Deux plongées de nuit, sans guide, sur Umbria et
Précontinent. Sha'ab Rumi se trouve à une quarantaine
de kilomètres, à vol d'oiseau, de Port Soudan.
Umbria. C'est un cargo italien de 153 mètres qui git à 30 mètres de fond. sabordé par son équipage le jour de la déclaration de guerre en juin 1940. J'en ai fait cinq plongées sur cette épave, faciles. La première plongée d'adaptation où j'ai découvert que l'eau à 25 dégrées était froide et avec ma combinaison de 5mm au bout d'une demi-heure j'avais horriblement froid. On m'a prêté un survêtement avec cagoule et ensuite tout allait bien.
Il
faut plusieurs plongées pour bien profiter d'une belle épave.
La première fois j'ai fait le tour par l'extérieur.
L'hélice doit faire
trois mètres de diamètre. Au suivant on commence par
les coursives et ensuite on y
va carrément dedans.
Il y a des tas d'obus et de
la munition pour des armes
légères, des bouteilles
aussi. Le clous de l'exploration sont les trois Fiats.
Dans les cuisines on admire les fours
et le carrelage. Surtout que
je venais de raconter l'histoire du carrelage italien! Les quantités
de poussières et la faiblesse de mon petit flash font que mes
photos sont de qualité médiocre, mais elles sont de
moi!
Pour
la plongée de nuit le guide, qui n'est donc pas venu avec
nous, nous avait dit de ne pas entrer dans l'épave. Je ne suis
pas allé, pour ne pas effrayer les deux autres plongeurs de la
palanquée. On a fait le tour et on cherchait de petites choses
dans le corail. A part d'un couple de nudibranches il y avait la
faune ordinaire: des perroquets
qui dorment, dont un couple
illégitime. Une jolie étoile,
un oursin à côté
d'un bénitier. C'est tous se que j'ai trouvé
d’intéressant.
Sha'ab
Rumi & Sanganeb.
12 plongées à la recherche des requins marteaux, avec
ce résultat décevant. Voilà comment se passent
les plongées aux marteaux. Le bateau est ancré dans
l'intérieur du lagon. Le zodiac
nous amène à la ponte Nord ou Sud du côté
extérieur du récif. Immersion sur un fond de cinq
mètres, au bord du platier et descente sur le plateau, à
une vingtaine de mètres. Ensuite on cherche les requins,
jusqu'au une quarantaine de mètres. Je suis allé
jusqu'au 43m. C'est eux qui choisissent: soit ils viennent, soit ils
ne viennent pas. Ils ne sont pas venu souvent, surtout pas les
marteaux. J'ai vu surtout des requins gris.
A Sha'ab Rumi Sud, au milieu du plateau habite un banc
de barracudas. De retour de
plongée, une fois, il y avait des dauphins
dans le lagon. On est allé à l'eau, en tuba, mais moi
je ne les ai pas vus sous la surface.
Quand
on plonge profond, au bout de quelques minutes l'ordinateur impose un
palier de décompression à une certaine profondeur. En
pratique, si on ne reste pas très longtemps dans le profond et
si on passe du temps dans du moins profond, le palier se résorbe.
C'est autorisé dans le protocole CMAS (école française)
et c'est comme ça qu'on plonge d'habitude. Nos guides nous
imposaient le protocole PADI (école anglo-saxonne) qui
interdit les paliers: la remontée commence dès que
l'ordinateur nous annonce qu'on est a une minute du palier. Donc on
restait moins longtemps dans les lieux de possibles rencontres et
très longtemps dans l'aquarium sous
le zodiac. Sauf que la faune
n'est pas aussi riche et variée qu'en Asie. Voilà
quelques photos:
Precontinent
II. Juste à
côté de la passe du lagon de Shaab Rumi, à une
quinzaine de mètres de profondeur, le Commandant Cousteau
avait installé sa maison sous-marine en 1963. J'ai fait deux
plongées, une de jour et une de nuit. Au fond ne restent que
la soucoupe, la cage aux requins et quelques ferrailles. La soucoupe,
couverte de corail, tient toujours sur ces pieds. J'y suis rentré
et de jour et de nuit.
Dedans il y a de l'air sous plafond,
les guides nous avaient prévenu de ne pas le respirer. Je n'ai
pas compris à quoi servait la cage
au requins, néanmoins je suis allé dedans
aussi. La nuit il y avait quelques poissons
endormies.
Le Phare de Sanganeb, habité, fonctionne avec une portée de trente kilomètres. Posé sur le platier, ce phare est majestueux. La vue d'en haut aussi. J'étais étonné qu'on soit parti qu'à 10 pour le visiter. Surtout des commentaires de certains: je suis déjà allé!
Deux pontons permettent d'accoster au phare, un à partir de la haute mer pour l'approvisionnement, l'autre à partir du lagon pour l'accès des touristes..
Du haut la vue est superbe. Il faut un zoom très puissant et cliquer sur la photo pour voir notre bateau:
Dans
le lagon de Sanganeb nous nous sommes frottés à la
légende urbaine sur le trafic d'armes. Les plongeurs qui
rentrent de la région racontent qu'ils ont vu des bateaux qui
trafiquent des armes. Sur le bateau on nous a affirmé la même
chose. Sur place on voit des manèges étranges dans le
lagon: des transfèrements bizarres entre bateaux. Pourquoi je
le qualifie de légende urbaine ? Tout simplement si commerce
illégale il y a, comment ça se fait que tous les
plongeurs sont au courent et pas des puissances qui n'acceptent pas
ce commerce? En effet il devrait s'agir de toute sortes de trafiques
stratégiquement peu importants ou des manipulations pour des
raisons fiscales, réglementaires ou administratives.
La croisière se termine par 24 heures à l'encre dans le port. Je suis pour une dernière fois impressionné par l'incuriosité de mes compagnons. Le dernier soir je suis sorti avec seulement trois espagnols et un italien. Notre couple d'espagnols avait retrouvé une autre connaissance: Mohamedino (Petit Mohamed, en italien, parce qu'il est petit).
J'étais
ravi de découvrir le café soudanais: servie dans une
cruche par une belle serveuse
et accompagné de l'encens. La chicha c'était une
découverte pour moi aussi. Je n'ai jamais fumé, je ne
peux pas avaler la fumée et pour cette raison je n'ai jamais
essayé la chicha non plus. Je ne savais pas que sa fumée
est si douce. Ceci dit, deux ou trois bouffées m'ont suffi. La
prochaine fois, comme d'autres pour le phare de Sanganeb, je dirai:
Merci, j'ai déjà fumé! A la fin de la soirée
je me suis fait un copain!
On avait prévue, avec les espagnols, d'aller au marché le lendemain. Il se sont dégonflés. J'ai eu la flegme d'y aller seul. J'aurai du. J'aime bien visiter les marchés. J'envisageais d'acheter des dattes locales. Plus tard, à l'aéroport, j'ai croisé des plongeurs qu'y sont allés. Ils avaient trouvé aussi des mangues et des épices.
Je termine ce récit avec la photo d'un couple d'amoureux sur la rive. Il y a des choses qui sont pareil sous tous les méridiens et toutes les latitudes:
Si on observe attentivement la photo, on remarque que le mec consulte son portable! Une preuve de plus que c'est partout pareil!