Chichicastanengo et le lac Atitlan
Dès l'arrivée, la première mésaventure: mes bagages n'étaient pas là. Ils m'avaient dit de téléphoner le lendemain, chercher M. Rodriguez. Je ne pouvais pas imaginer qu'ils soient perdus, mais j'ai paniqué en pensant qu'il faudra, peut-être, aller acheter le nécessaire: brosse à dents, vêtements (il faisait chaud et il faudra se changer souvent), et moi je n'avais que sept jours.
Bagages ou pas, de l'aéroport je pars directement pour Chichicastanengo, le village au marché indien le plus réputé de l'Amérique Centrale. Le marché se tient le dimanche et le jeudi, et demain c'est le dimanche.
J'arrive la nuit à Chichi, je trouve un hôtel, je m'installe et je sors faire un tour. L'Amérique Centrale n'est plus dans la télé, mais autour de moi, j'y suis. Sur la place, peu éclairée, les paysans sont déjà là, des ombres portent et rangent des marchandises, d'autres sont installés et dorment sous des couvertures. Il pleut, du crachin. Il fait humide. Le matin, sous le soleil, je découvre le marché. Sur la place du village, entre les deux églises, ça grouille. Je dirai "noire du monde" mais l'expression ne colle pas. C'est tellement coloré. Et il n'y a presque pas de touristes.
Je n'ai, peut-être, jamais ressenti autant de compassion pour des autochtones qu'ici au pays des indiens Quitché. A part cette histoire de roue, la peau de leurs visages a ce triste aspect des gens usés au travail. Du travail qui ne leurs avait jamais apporté grand-chose. Je garde en mémoire leurs sourires aux dents pourries, ils ne vivront jamais l'angoisse de la fraiseuse du dentiste. Et je ne parle pas de ce que le touriste ne voit pas: la ségrégation raciale douce dont ils sont victimes. Quel gâchis, quand on voit leurs capacités créatives, là où ils peuvent s'exprimer: dans les tissus et l'artisanat. Bon, leur cause n'étant pas médiatisé, continuons.
Dans l'après-midi je dois continuer, l'étape suivante est Panahachel, sur le lac Atitlan. C'est le lac qui est entouré de trois volcans de carte postale. Pour bien profiter de la vue il faut se lever tôt, dès le début de la matinée des nuages s'accrochent aux sommets. Sur la rive opposée se trouve le pittoresque village de Santiago Atitlan où les femmes portent de curieux turbans sur les têtes et les hommes des pyjamas aux fesses.